Je pense que tu sais de quoi je vais te parler aujourd’hui, j’ai pas le choix, j’aurai aimé que ça se passe autrement, mais la vie est faite de moments durs. Tu l’auras compris, décryptage de l’Euro avec un gros point, trop gros pour l’élimination de l’Équipe de France.

L’Équipe de France éliminée

Aujourd’hui l’Équipe de France s’est faite éliminée de l’Euro, ou peut-être hier, je ne sais pas. Je ne sais pas si le plus dur est de perdre contre une équipe qui est sur le papier à des années lumières des champions du monde ou d’avoir eu tant d’espoir sur des bleus qui nous font tant rêver. Quoiqu’il en soit, ce fut dur de trouver le sommeil, encore plus d’ouvrir les yeux en étant éliminé. Décryptage d’une soirée cauchemar.

Ça aurait du être un match plus qu’abordable. À Bucarest en Roumanie, des milliers de spectateurs français ont fait le déplacement, l’ambiance est bonne, la température est idéale, la pelouse parfaite. Avec les blessures de Lucas Digne et Lucas Hernandez sur le côté gauche, Deschamps revoit son dispositif et aligne une équipe formée en 3-5-2.

Lenglet vit sa première titularisation en Euro, Rabiot se charge du côté gauche pour palier l’absence des deux défenseurs français. Pas de surprises pour le reste de la composition. Avec Pogba et Kante au milieu de terrain c’est 0 défaite, la France est sereine.

15 minutes, c’est le temps qu’il a suffi pour que tous les français enlèvent le sourire de leur visage et se disent bon, il faut les prendre au sérieux. Fautif sur le but, Clément Lenglet perd son duel aérien face à un Séférovic en mission. La première titularisation du défenseur barcelonais est un naufrage. Pourtant, il reste 75 minutes, la peur n’est pas là, on a confiance on sait de quoi les bleus sont capables. Les minutes passent, le match est haché, l’Équipe de France n’est pas dedans. Les suisses en veulent, mettent de l’impact, se battent et dévorent les français sur les 45 premières minutes. C’est la mi-temps, la France est menée logiquement 1-0.

Alors pendant 15 minutes, on se transforme en sélectionneur. “Sors Lenglet et faire rentrer Coman”, “Repasse en 4-2-3-1”, “Fais descendre Rabiot d’un cran et passe à 4 défenseurs”, “Coman doit rentrer pour dynamiser l’attaque c’est trop plat”.

La France entière est devenue en quelques instants le plus grand entraîneur du monde. Et les souhaits sont exaucés, réaction imminente, Lenglet sort remplacé par Coman, la France repasse en 4-2-3-1, Coman prend le flanc de l’attaque gauche, Rabiot prend le rôle de latéral gauche. On y croit, il reste 45 minutes, nous sommes l’Équipe de France ça va aller.

La deuxième période repart sur des bases plus sereines, on a plus le pied sur le ballon, l’attaque est plus dynamique. Et là, à la 54ème minute Pavard fait lever tout le peuple français.

Pas pour un second poteau cette fois-ci, mais pour un tacle non maîtrisé à l’entrée de la surface de réparation sur l’attaquant suisse. Un tacle que tu n’as pas le droit de faire quand tu es défenseur droit du Bayern de Munich. Dans un premier temps l’arbitre ne siffle pas faute, mais la VAR l’interrompt rapidement, l’arbitre revoit les images et désigne le point de pénalty. Hugo Lloris, son dernier pénalty arrêté chez les bleus était il y a 9 ans. On s’assoit, on prie, mais on lit déjà 2-0 au tableau d’affichage. Comme tout un symbole il part du bon côté et stoppe le pénalty. Il ne peut rien nous arriver c’est notre soir, le capitaine montre le chemin.

Deux minutes plus tard, à la 57e minute sur un enchaînement de très grande classe, Karim Benzema trouve le chemin des filets, 1-1. 59e minute, Griezmann centre, le ballon est dévié par le gardien, mais Karim est là au second poteau pour ajuster sa tête dans le but vide, 2-1 pour les bleus. 90% des français sont en train d’hurler qu’ils vont floquer leur maillot Benzema, on rigole, on respire, on se relâche.

La France n’est pas trop en danger ils maitrisent le match, mais on connaît la chanson, il faut faire le break. Alors qui d’autre ? Qui d’autre que Paul Pogba monstrueux depuis le début de l’Euro pour nous sortir un but d’exception comme il en a le secret. 25 mètres seul dans l’axe, il se tourne sur son pied droit et envoie une frappe enroulée puissante, dans la lucarne droite du portier suisse. La France est debout Pogba achève son oeuvre et est récompensée de la plus belle des manières, par une frappe qui le caractérise tant, venu d’ailleurs.

Il reste 15 minutes, la France mène 3-1, on se distrait, on rigole, on analyse déjà le match contre l’Espagne en 1/4 de finale, on se demande où on va voir le match vendredi soir. 81e minute, Seferovic encore lui, reçoit un centre millimétré et crucifie Lloris d’une tête surpuissante.

Il reste 10 minutes, plus qu’un but sépare les deux équipes. On se regarde du coin de l’oeil “imagine on fait comme les espagnols”, mais on est champion du monde, alors on y croit pas. À la 85e minute les suisses marquent, mais le drapeau se lève rapidement pour signaler une position de hors jeu, on y croit pas. On se fait peur comme souvent, mais à la fin c’est toujours la France qui gagne. Pour les suisses c’est non, les français sont friables et ils le sentent. 90e minute, Gavranovic se joue de la défense française et enchaine à l’entrée de la surface d’une frappe croisée au ras du poteau, Lloris s’étend, mais il est trop court, 3-3. On attend patiemment la fin du match, mais Coman en décide autrement. 95e minute, il reçoit le ballon dans la surface et enchaîne d’une frappe, qui part bien, trop bien, mais qui s’écrase sur la barre transversale. On se rassoit, on revoit le poteau de Gignac en 2016, on attend les prolongations.

On a un bon groupe, un banc de folie, des joueurs qui peuvent faire la différence, on est physique, on va les bouffer. Mais le foot n’est pas une science exacte, les suisses ont faim, n’ont rien à perdre et veulent éliminer les champions du monde. Thuram, Sissoko et Giroud ont fait leur entrée, le message est clair, il faut de l’impact, du physique, des guerriers. Les suisses démarrent fort les prolongations, sans se créer néanmoins de grosses occasions et faiblissent vite. Les bleus ont le pied sur le ballon et maîtrisent.

A tel point que Mbappé fait l’appel parfait dans la surface, Pogba lui glisse un ballon entre les défenseurs, il est légèrement excentré face au gardien, arme du pied gauche et envoie la balle… loin du cadre. Stressé, fatigué, pas réaliste, il veut trop en mettre et dévisse complètement sa frappe. Le match se calme, un dernier coup-franc bien placé pour les suisses fait accélérer nos coeurs, mais la frappe passe loin du cadre. On y est, fin de la rencontre, tirs aux buts.

Les tirs aux buts, exercice où Créteil pourrait battre le Réal Madrid, il n’y a plus de favoris, c’est du 50/50. LLoris a déjà arrêté un pénalty dans le match, on se dit qu’il est confiant, qu’il a l’ascendant psychologique, on regarde son voisin on se dit que ça va aller, mais oui ça va aller.

Les suisses entament la séance. Aucun échec, que ce soit du côté français ou suisse, les pénaltys sont bien tirés, les gardiens pas au rendez-vous pour le moment, LLoris ne plonge jamais du bon côté. C’est au tour de l’enfant prodige, Killian Mbappé, celui qui nous a tant fait rêver pendant la Coupe du Monde, celui qui est considéré comme le prochain ballon d’or français, celui qui a demandé plus de responsabilités. S’il rate, la France est éliminée.

C’est logique que ce soit lui qui le rate, on le sait tous qu’il va rater, c’est écrit. Il s’élance, le gardien suisse part du bon côté, le pénalty est arrêté. Killian a pris ses responsabilités, a assumé son rôle et eu le courage de tirer le pénalty décisif, mais il échoue. Rien ne sert de l’accabler, cette défaite est un naufrage collectif et non individuel, même si on attendait beaucoup de lui. La France, favorite, est éliminée dès les huitièmes de finale.

Alors ce matin, on prend du recul, on félicite la Suisse qui a été forte mentalement et qui est allée chercher la plus belle victoire de leur histoire. On est rationnel et on fait la part des choses. Quant à l’Équipe de France, ils doivent oublier et redescendre de leur nuage. 3 ans auparavant nous étions sur le toit du monde, en 2021, le toit de l’Europe nous échappe.

Ne les accablons pas, ils sont passés à côté ça arrive, même si on se voyait déjà tout en haut de l’affiche. Ça va, la Coupe du Monde est dans un an, c’est bientôt là, on va aller la chercher. C’est pour ça qu’on aime le foot, pour ce genre de moments, même si hier soir l’histoire s’est écrite de l’autre côté de la frontière. La Suisse est en fête, la France se pleure, mais salue l’Euro exceptionnel de Paul Pogba, Karim Benzema, Ngolo Kanté et Raphaël Varane. Ils seront là dans un an, nous aussi, rendez-vous au Qatar.

Les autres qualifiés

L’Espagne se qualifie après prolongations en s’imposant 5-3 au terme d’un match fou face à la Croatie. La République Tchèque crée la première surprise de cet Euro en battant les Pays-Bas 2-0. Les belges gagnent à la française face aux portugais 1-0. L’Italie se qualifie pour les quarts de finale en venant à bout des autrichiens, en prolongation également, 2-1. Les danois expédient les gallois 4-0. Dernières rencontres ce soir, l’Allemagne joue l’Angleterre chez eux à Wembley (18h) puis la Suède affronte l’Ukraine à 21h.

Les Quarts de finale :

  • Belgique-Italie
  • Suisse-Espagne
  • Suède/Ukraine-Angleterre/Allemagne
  • République Tchèque Danemark